Résumé : Introduction : Les séquelles de la violence sont souvent difficiles
à déceler derrière des plaintes somatiques banales. La physiothérapie peut tenir
une place essentielle dans la prise en charge des victimes de violence en permettant
de contourner les réticences à évoquer un vécu traumatique. Matériel et méthode
: Un dépistage systématique d'antécédents de violences a été effectué auprès
des requérants d'asile attribués au canton de Genève entre mai 1993 et février
1994. Dans le cadre d'un nouveau programme global de réhabilitation, une partie
des patients ayant un vécu traumatique en lien avec des antécédents de violences
a été mise au bénéfice d'une physiothérapie adaptée. Résultats : Deux tiers
des 572 requérants d'asile présentaient une anamnèse de violence, 37 % des plaintes
somatiques et 27 % des plaintes psychologiques. Ces plaintes étaient associées
à des allégations de violence chez 35 % des requérants contre 17 % chez ceux
sans anamnèse de violence. Dans un autre collectif de soixante-seize réfugiés
porteurs d'un vécu de violences et évalués par un psychologue, cinquante-six
présentaient des problèmes psychologiques dont quarante et un justifiaient une
prise en charge. Les plaintes somatiques relevées dans un troisième groupe de
quatre-vingt-deux victimes de torture concernaient essentiellement l'appareil
locomoteur et motivaient le plus souvent la première consultation. En ce qui
concerne la prise en charge physiothérapeutique, une évaluation systématique
de cette approche est en cours. Seuls sont présentés ici quelques résultats
préliminaires et les arguments qui justifient a priori cette approche. Discussion
: Les difficultés de communication retardant fréquemment le diagnostic, le physiothérapeute
doit tenir compte de la spécificité des séquelles de violence tant sur le plan
biomécanique que psychologique. Ce lien entre troubles psychologiques et plaintes
somatiques constitue l'aspect le plus spécifique d'une physiothérapie ciblée
sur les victimes de violence. Développée d'abord chez les victimes de torture,
cette forme de physiothérapie semble généralisable à tous les types de violence.
En traitant la "mémoire corporelle", elle facilite l'approche psychologique,
diminue les réactions physiologiques du stress et restaure une "confiance de
base" à travers un contact bénéfique avec la main de l'autre.